« Je n’ai jamais aimé les histoires d’amour… Si on veut raconter d’une manière un peu plus fine, on est obligé de prendre d’autres chemins. Je trouve que le deal est un moyen sublime. Ça recouvre vraiment tout le reste. Ce serait bien de pouvoir écrire une pièce entre un homme et une femme où il est question de business. » Bernard-Marie Koltès, Une part de ma vie.

Ce serait l’histoire d’une rencontre, celle de Tella Kpomahou, comédienne ivoirienne et béninoise, avec le texte de Bernard-Marie Koltès, texte qui l’a immédiatement située dans une de ces rues sombres, partiellement éclairée par quelques néons, d’Abidjan ou d’une autre ville d’Afrique de l’Ouest. Elle serait le Dealer ou plutôt la Dealeuse noire, face au Client blanc égaré dans ces quartiers. Elle peut vendre tout ce qui est illicite, prête à tout trafic illégal et prohibé, connaissant des désirs de ce client désorienté qu’il ne connaît pas lui-même ou n’ose s’avouer…

Notre action se passe donc dans les dernières lignes d’une grande ville africaine, à l’orée d’un conflit. La violence peut surgir tout à coup, et la présence des armes pèse comme une menace. Une ambiance néons, habitat précaire fait de matériaux de récupération, un comptoir en bois devant une échoppe close, couleurs à la fois bigarrées et délavées. Une ambiance sonore dense et présente, sons du réel, passage de voitures au lointain, néons qui grésillent, éclats de voix lointains, musique en direct sur une enceinte que la dealeuse allume à sa guise, mais aussi présences animales par la proximité d’une forêt en lisière de la ville…
Une jeune femme, treillis, veste d’homme, armée et qui a, à porté de mains, tout ce qui se vend d’illicite, en substance et en nature. Prête à tous deals. Le client est un homme blanc, étranger au lieu et jusqu’à lui-même. Suspicieux et pourtant plein de désirs inavoués, inavouables ?